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Une multitudes de chroniques historiques sur les 4 époques de l'Histoire, que ce soit ancienne, médiévale, moderne ou contemporaine. On y trouve des chroniques sur les hommes et les femmes qui ont fait l'Histoire, les événements marquants au plus insolites....

La Thaumaturgie ou les pouvoirs exceptionnels des souverains

La Thaumaturgie

Le touché des écrouelles

Définition et étymologie…

« Thaumaturge », est issu du grec ancien θαυματουργός, thaumatourgós (« faiseur de miracles ») lui-même formé des mots grecs ergon, c’est-à-dire « action », et thauma, « objet d’étonnement ou d’admiration », « merveille ». Ainsi, la thaumaturgie renvoi donc à ce que l’humain a détonnant.

Le concept de thaumaturgie renvoi à l’être dit « thaumaturge ». C’est un être qui a la prétention de faire des miracles, que ce soit par une guérison ou bien un maléfice. Son omniscience est reconnue, tout comme sa vertu pieuse… C’est ainsi que J.K Huysmans écrit dans « l’Oblat » de 1903 « Ce moine, le P. Paul de Moll aurait été l'un des plus extraordinaires thaumaturges de notre temps. Il guérissait, comme en s'amusant, tous les maux ». C’est aussi un individu que l’on nomme magicien, faiseur de miracle. C’est donc une définition méliorative qui en ressort ; cependant, le thaumaturge n’a pas toujours une facette de bon saint Maritain et de guérisseur. Gobineau et Tocqueville ont correspondu et dans l’une de leur lettre, le thaumaturge est l’homme qui défie les lois naturelles, celui qui est apparenté à un magicien douteux. Il est écrit « Les thaumaturges ravivaient les cultes mithriaques, celui d'Isis, ou la simple magie ».

La définition tend à nous amener vers la caractéristique d’une personne, mais le pouvoir de thaumaturgie ne se limite nullement aux Hommes. En effet, les objets ou reliques peuvent bénéficier d’un pouvoir guérisseur et apaisant au même titre que l’humain. Il sera aussi dit « thaumaturge ».

 

La Thaumaturgie comme expression du divin…

La « Thaumaturgie » est une expression du divin. C’est la capacité de guérir par le touché, mais aussi le gage d’une vertu appréciée et assimilée aux miracles. Ce terme de « miracle » n’est pas anodin car, il fait nécessairement penser à la religion, que ce soit chrétienne, juive, musulmane, bouddhiste, hindouiste… Ait offert aux protagonistes de chacune des religions des capacités magiques, thaumaturgiques faisant d’eux des êtres exceptionnels, des guides exceptionnels. Concernant la religion catholique, les miracles de Jésus concernent généralement les individus, qu’il s’agisse de la guérison ou de l’exorcisme. C’est dans un contexte éclaté au 1er siècle de notre ère, dans une période de crise sociale du judaïsme que Jésus déclare son autorité « par-dessus la « Tradition des Anciens », à partir de ses actions « miraculeuses » et de ses paroles « prophétiques ». (Simon Claude Mimouni Le christianisme des origines à Constantin).

Les miracles occupent donc une grande place dans les évangiles. Ils peuvent être divisés en cinq catégories :

  • Les guérisons et même la renaissance d’un corps mort
  • L’exorcisme qui repose sur la libération d’un corps possédé par le Mal
  • Des prodiges de générosité telle que la multiplication du pain
  • Des prodiges justifiant une pratique telle que la transgression du sabbat
  • Des sauvetages miraculeux dont le sauvetage des disciples pris dans une tempête en est l’illustre exemple
La multiplication des pains par Jésus

Les miracles se trouvent aussi bien dans le christianisme que dans le monde de Judéen. Ces derniers ne sont pas considérés comme des évènements qui échappent à la volonté divine, au contraire, c’est une preuve de son action. Les miracles sont donc une preuve comme quoi la divinité salvatrice est capable d’intervenir à tout moment ; notamment quand il crée le peuple au moment de l’Exode. On se méfie pourtant grandement de la magie qui est apparentée au démon et non à Dieu. Les thaumaturges et les exorcistes sont des serviteurs de Dieu qui agissent en son nom. S’ils en profitent personnellement, ils sont considérés comme des magiciens.

              Concernant la religion musulmane, il y a aussi des miracles qui y sont exposés. Il est nécessaire de distinguer les miracles qu’Allah peut faire en tant qu’entité suprême et les miracles fait par des amis proches à la suite de capacités qu’il leur accorde. Ce sont les Awjilah. Parmi les miracles, il y a celui de la guérison d’Ali. L’histoire débute en période de guerre. Le Prophète décide d’offrir l’étendard de la communauté à celui qu’Allah choisirait comme le plus digne. La guerre débute et c’est Ali l’élu. Cependant, on dit à Allah que l’élu ne peut être choisi en raison de sa maladie oculaire. Celui-ci insista. Une fois Ali auprès de lui, il cracha dans ses mains et les déposa sur les yeux de l’indigent. Ce dernier pu de nouveau voir et la bataille fût gagnée.

Chaque religion possède son lot de miracles. C’est le caractère divin des dieux qui permet cette thaumaturgie. Ce caractère va par la suite s’étendre à d’autre individu que le divin lui-même. C’est le cas des rois qui représentent tout de même Dieu sur terre, ou bien l’exemple que nous allons voir Apollonius de Tyane.

 

Apollonius de Tyane

              Le monde grec lui aussi reconnait les miracles et accorde un large discrédit aux dieux guérisseurs qui sont vénérés dans de nombreux sanctuaires. Pas moins de 80 récits relevant de cette croyance et témoigne de cette ancienneté. Parmi elle, il y a celle du sanctuaire d’Asclépios à Epidaure (dieu de la médecine) datant du IVème siècle avant notre ère. Ce sanctuaire était connu pour son pouvoir guérisseur ; ainsi, les pèlerins malades passaient la nuit dans le temple et durant leur sommeil, le dieu Asclépios apparaît dans leurs rêves et leurs dicte les soins qui leur sont nécessaires. Malgré tout, le monde grec reconnait aussi cette capacité à des sages. C’est le cas d’Apollonius de Tyane.

L’Académie française renvoie le concept de thaumaturgie aux doctrines d’Apollonius de Tyane dont le thème y avait une grande place. C’est un philosophe et sage grec que certaines personnalités telles que Socrate comparent au Christ. Son caractère divin voit le jour avant même sa naissance. Sa mère enceinte fait un rêve dans lequel on lui annonce qu’elle accouchera d’un devin connaissant aussi bien le passé et le futur. Bénéficiant de l’inspiration des dieux, il maîtrise toutes les langues et est totalement omniscient. Tout comme les dieux et il réalise des exorcismes, des guérisons, voire des résurrections miraculeuses, des libérations surnaturelles. Tout cela faisant de lui un thaumaturge.

Apollonius de Tyane

Il affirme détenir ce pouvoir non pas de la magie, mais de la sagesse, qu’il définit par la connaissance des dieux. Ici il est judicieux de faire un lien entre l’idée de connaissance et croyance des dieux avec l’idée de foi nécessaire aux chrétiens pour connaître de véritable miracle. Jésus lors d’un acte dit miraculeux va fonder sa réussite sur la foi. En effet, « la plupart du temps, il donne clairement à entendre que l’action qu’il fait, ou va faire, restera inintelligible en dehors d’une attitude qu’il caractérise comme une attitude de foi » écrit Joseph Doré dans La portée révélatrice des miracles de Jésus.

              Ce personnage d’Apollonius fût après sa mort l’objet de divination à la faveur d’un processus de mythification commandité par l’impératrice Julia Domna. Elle demanda à Philostrate d’écrire sur la vie du personnage dans l’optique d’arrêter l’expansion du christianisme. Les fidèles du paganisme trouvèrent en Apollonius une figure de saint, de thaumaturge à opposer au Christ. Le but étant de discréditer la religion catholique. Finalement, l’Apollonius fut un grand personnage dit thaumaturge, que même l’Académie Française assimile à ce concept.

 

Les rois thaumaturges et leurs liens avec le divin…

La thaumaturgie va se répandre dans l’Histoire pour devenir un caractère autre que propre à des divinités ; un caractère royal. Il ait dit précédemment que Jésus a exercé des miracles, qui ont été montrés comme des signes que le Règne de Dieu est en train de se manifester en sa personne. Cette manifestation de la force divine est reconnue en la personne du souverain. Cette dernière doit imposer sa puissance dans tous les domaines (pouvoir temporel) et doit se faire respecter. Ces derniers ne sont pas considérés comme des êtres classiques car, ils détiennent leur pouvoir de Dieu lui-même. Ce n’est pas pour autant qu’il possède le pouvoir spirituel dévolu au pape. Tout comme auprès du Christ, pour accueillir au mieux ce miracle, la foi est nécessaire. C’est cette idée de la thaumaturgie que les rois de France notamment, mais aussi les grandes figures de la chrétienté vont utiliser pour justifier la soumission du peuple au souverain et à la religion.

C’est Marc Bloch dans son ouvrage Les rois thaumaturges, traite des pouvoirs fabuleux prêtés aux rois français et anglais.

C’est dernier par un rite curieux avaient la capacité par simple touché des mains, de guérir miraculeusement le malade atteint des écrouelles ou des scrofules. Le mot « écrouelles » désigne l’adénite tuberculeuse. Les médecins à l’époque médiéval traitaient volontiers les écrouelles de toutes inflammations. Marc Bloch signale l’importance du rituel car, c’est par le rituel du sacre que les rois se voyaient conférer le pouvoir thaumaturgique. En effet, le jeune roi lors de son sacre reçoit le pouvoir de Dieu. Il en devient le représentant sur terre ; ainsi des pouvoirs mystiques lui sont conférés.  Le touché même des écrouelles obéissait à un rituel particulier. Tout d’abord, le souverain ne le faisait que de manière occasionnelle, lors de fêtes, à certaines occasions et certains lieux. Le rite se déroule en deux temps, il y a tout d’abord le touché de main, qui est suivi d’un signe de croix et d’une formule. Ce cérémonial a pour but de rendre authentique l’acte du souverain et de le rendre davantage solennel.

Le plus ancien roi de France qui aurait agi de telle manière serait Robert le Pieux, mais nous avons la certitude concernant cette pratique chez Philippe Ier. La coutume du touché se perpétua jusqu’à la Révolution, sans interruption. Puis c’est avec Charles X que cette pratique est remise au goût du jour. Il souhaitait retrouver une place de roi suprême comme au temps des chevaliers et de Louis XIV mais le retour en arrière n’a pas été apprécié par le peuple français.  

              L’Angleterre et les souverains qui s’y sont succédés ont fait état des mêmes pouvoirs. « Si Henri II est le plus ancien roi dont on puisse « affirmer avec assurance qu’il toucha les scrofuleux » », Marc Bloch pense davantage à Henri Ier. La montée du protestantisme en Angleterre ne fit pas abandonner cette coutume. Il faut attendre Guillaume d’Orange qui lui s’y refusa, y voyant une pratique superstitieuse. Finalement, c’est la reine Anne qui repris le rituel du touché mais fût la dernière.

Les rois Anglais bénéficiaient d’un pouvoir miraculeux que les souverains français ne pouvaient se vanter de posséder. En effet, lors d’une cérémonie du vendredi saint, le souverain distribuait des anneaux à valeur curative. Au XVe siècle, des textes parlent des maladies que l’on cherchait à vaincre, que sont les courbatures, l’épilepsie…

Si un jour « les rois de France et d’Angleterre ont pu devenir de miraculeux médecin, c’est parce qu’ils avaient aux yeux de leurs peuples un caractère sacré »

 

L’opposition du Stoïcisme…

Il faut toutefois signaler que certains courants de pensée philosophiques, comme le stoïcisme, affichent une nette tendance à refuser les miracles, proposant des explications naturelles. En effet, le centre de la doctrine stoïcienne est la physique, l’étude de la Nature et de Dieu. C’est la nature et la sagesse qui gouvernent le monde. Aucune entité supérieure ne peut intervenir et produire des miracles, tout est rationnel. Les stoïciens prônent aussi une morale de liberté dans laquelle l’homme demeure libre. Les Hommes ont la maitrise et le contrôle de nos représentations. Ainsi, rien n’est pas explicable naturellement.

 

Bibliographie et sitographie:

  • Le Stoicisme (la-philosophie.com)
  • Jacques Le Goff, Le métier d’historien. Maitre et inspirateurs dans Une vie pour l’histoire, 2010
  • Michel Sot, L’audience : Rituels et cadres spatiaux de l’Antiquité au haut Moyen Age dans L’audience, 2007
  • Marc Bloch, Les rois thaumaturges. Etude sur le caractère surnaturel attribué à la puissance royale, particulièrement en France et en Angleterre,1924
  • Jacques Boulogne, Apollonius de Tyane. Le mythe avorté d’une sagesse totale, 1999
  • Simon Claude Mimouni, Chap IV Les actions et les paroles de Jésus dans Le christianisme des origines à Constantin, 2006
  • Mgr Joseph Doré, La portée révélatrice des miracles de Jésus dans Recherche de Science Religieuse, 2010
  • APOLLONIUS DE TYANE - Encyclopædia Universalis
  • Thaumaturge : définition de « thaumaturge » | La langue française (lalanguefrancaise.com)
  • Frédéric Neyrat, Horreurs et merveilles de l’impossible, 2017
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